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  La théorie scientifique dans l'antiquité







Comment prouvaient-ils leurs théories ?

Malgré leurs observations et le rassemblement d’idées pour fonder leurs théories les savants ont besoin de la reconnaissance scientifique pour que leurs théories soient valides ou au moins acceptées. 
On retrouve cette volonté de prouver ces théories en particulier chez les grecs, qui défendent une certaine rigueur scientifique. Un des moyens les plus usités par les grecs est bien sûr la démonstration ; très prisée par les mathématiciens de l’époque, elle est une nouvelle manière de tenter d’expliquer certains phénomènes. Celle-ci est une des caractéristiques de la civilisation grecque par rapport aux autres civilisations. Cela ne laisse pas entendre qu’il n’y ait pas eu de démonstration dans les autres civilisations et en particulier chez les latins, bien au contraire nous verrons prochainement que Lucrèce s’y aventure.  
Néanmoins chez ces autres civilisations, les résultats établis sont quelque peu complexes et difficiles a comprendre en premier lieu. Chez les grecs, les démonstrations sont concises et explicite : elle devient obligatoire pour qu’une théorie soit vérifiée et acceptée. S’appuyant sur un enchainement de déductions logiques agencées avec rigueur, elle est très présente chez Euclide ou Pythagore qui l'utilise pour les mathématiques. Ses démonstrations vont apporter des connaissances irréfutables aux savants des autres siècles et à nos savants contemporains ( les mathématiques modernes s'appuient sur certaines de ces théories comme celle que nous allons développer ci dessous ). Voici un exemple de démonstration mathématique réalisée par euclide et extraite de La géométrie des éléments proposition I : 
 
PROBLEME : Construire un triangle équilatéral sur une ligne droite donnée et finie. 
 
EXPOSITION : Soit AB une droite donnée et finie (on dirait aujourd’hui un segment [AB]) . 
 
DETERMINATION : Il faut construire sur la droite finie AB un triangle équilatéral. 
 
CONSTRUCTION : Du centre A et de l'intervalle AB, décrivez la circonférence BCD (demande 3) ; et de plus, du centre B et avec l'intervalle BA, décrivez la circonférence ACE ; et du point C, où les circonférences se coupent mutuellement, conduisez aux points A, B les droites CA, CB (demande 1). 
 
 
 
DEMONSTRATION : Car, puisque le point A est le centre du cercle CDB, la droite AC sera égale à la droite AB (définition 15); de plus, puisque le point B est le centre du cercle CAE, la droite BC sera égale à la droite BA ; mais il a été démontré que la droite CA était égale à la droite AB ; donc chacune des droites CA, CB est égale à la droite AB ; or, les grandeurs qui sont égales à une même grandeur, sont égales entre elles ; donc la droite CA est égale à la droite CB ; donc les trois droites CA, AB, BC sont égales entre elles. 
 
CONCLUSION : Donc le triangle ABC (définition 24) est équilatéral, et il est construit sur la droite donnée et finie AB.
 
 
Rappel:  
 
Demande 3 : D'un point quelconque, et avec un intervalle quelconque, décrire une circonférence de cercle. 
Définition 15 : Un cercle est une figure plane, comprise par une seule ligne qu'on nomme circonférence ; toutes les droites, menées à la circonférence d'un des points placés dans cette figure, étant égales entre elles. 
Définition 24 : Parmi les figures trilatères, le triangle équilatéral est celle qui a ses trois côtés égaux. 
Nous rappelons également que les crochets pour signaler les segments ou les parenthèses pour signaler les droites n'étaient pas encore utilisés.
 
 
Comme nous l’avons dit plus tôt, les autres civilisations connaissent la démonstration mais n’en ont peu être pas conscience eux même.  
Si on prend l’exemple des latins, on remarque que le plus important pour eux reste le résultat et ce qu’on peut en déduire plutôt que la manière de le démontrer et de le prouver. L’explication des phénomènes et les bases pour affirmer les théories apparaissent comme beaucoup moins importantes pour les latins que le résultat final.  
Si il s’avère que le résultat paraisse cohérent et vraisemblable alors peu importe la rigueur de l’explication, puisqu’on détient une théorie apparaissant comme juste.L'élaboration d'une compréhension satisfaisante est privilégiée à la preuve : un propos cohérent et vraisemblable est la seule condition pour valider une hypothèse. Par exemple, Lucrèce dans son livre De Rerum Natura utilise la démonstration mais elle apparaît comme extrêmement implicite et abstraite pour des lecteurs non spécialisés.  
Certes il utilise des méthodes pour prouver ses dires mais ces affirmations se basent uniquement sur des constatations et sur des faits contestables. Il affirme par exemple que «rien ne naît de rien» en expliquant sa démarche qui reste neanmoins très difficle à comprendre : 
 
"Principium cuius hinc nobis exordia sumet, nullam rem e nihilo gigni divinitus umquam. Quippe ita formido mortalis continet omnis, quod multa in terris fieri caeloque tuentur, quorum operum causas nulla ratione videre possunt , ac fieri divino numine rentur [...] Nam si de nihilo fierent, ex omnibus rebus omne genus nasci posset, nil semine egeret. E mare primum homines, e terra posset oriri squamigerum genus et volucres erumpere caelo; armenta atque aliae pecudes, genus omne ferarum, incerto partu culta ac deserta tenerent. Nec fructus idem arboribus constare solerent,sed mutarentur, ferre omnes omnia possent. Quippe ubi non essent genitalia corpora cuique, qui posset mater rebus consistere certa? 
At nunc seminibus quia certis quaeque creantur, inde enascitur atque oras in luminis exit, materies ubi inest cuiusque et corpora prima; atque hac re nequeunt ex omnibus omnia gigni, quod certis in rebus inest secreta facultas.

 
"Le principe que nous poserons pour débuter, c’est que rien n’est jamais, crée de rien par l’effet d’un pouvoir divin. Car si la crainte tient actuellement tous les mortels asservis, c’est qu’ils voient s’accomplir sur terre et dans le ciel maint phénomène dont ils ne peuvent aucunement apercevoir la cause, et qu’ils attribuent à la puissance divine […] Car si rien ne pouvait se former de quelque chose, de toutes choses pourrait naitre toutes espèces, rien n’aurait besoin de semence. De la mer pourraient soudain sortir les hommes, de la terre la gent à écailles, et du ciel s’élanceraient les oiseaux : bestiaux gros et petits, bêtes sauvages de toute espèce, engendrés au hasard, occuperaient indifféremment lieux cultivés et déserts. Sur les arbres, le fruits ne demeureraient pas les mêmes mais changeraient ; tous pourraient tout produire. En effet, puisqu’il n’y aurait point d’éléments fécondants propres à chaque espèce, comment les choses ne pourraient elles se former que dans une mère déterminée ? Mais en réalité comme tous les corps doivent leur création à des germes spécifiques, aucun ne peut être et aborder aux rives de la lumière ailleurs qu’au lieu où se trouvent la matière et les corps premier qui lui sont propres. Et c’est ainsi que tout ne peut être engendré de tout, puisque chaque objet déterminé possède des propriétés distinctes.
 
La démarche qu’il utilise ici est cohérente et vraisemblable. Si on dépasse le problème de compréhension du texte on remarque que sa théorie est tout à fait juste : par exemple sans labourer et planter des semences on ne pourrait pas avoir une récolte convenable. Cette idée développée dans le texte ci dessus est vraisemblable et absolument vraie. La démarche qu'il utilise est donc correcte mais n’est pas très rigoureuse car il est arrivé à ce qu’il cherchait à affirmer : le résultat est pour lui d'une extrême importance. Sa théorie se tient et l'ajout de preuves n'est pas une nécessité pour augmenter la certitude de ce qu'il avance. On peut également remarquer que ce qu'il affirme "Nam si de nihilo fierent , ex omnibu'rebus omne genus nasci posset , nil semine egeret" est l'exacte reproduction de ce que disait Epicure dans Lettres à Hérodote I , 38. Il reprend uniquement dans son poème les dires d'Epicure et ni apporte aucune preuve supplémentaire. 
 
 
L’acceptation des théories peut varier dans l’antiquité en fonction des civilisations et des savants. On peut voir que les grecs prônent la démarche utilisée plutôt que le résultat alors que les latins désirent le contraire. Néanmoins, il est indéniable que l'apport de ces civilisations à jouer un rôle important dans la construction des idées scientifiques d'aujourd'hui. 
 
 
 

   
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